« La maladie la plus constante et la plus mortelle, mais aussi la plus méconnue de toute société, est l’indifférence. », selon l’Abbé Pierre. Pour lutter contre ceci, l’association Solidarité Pyrénées à Perpignan, œuvre auprès de personnes en situation d’exclusion, de mal logement et de précarité. Elle redonne de la visibilité à ces personnes très souvent marginalisées.
Cette association véhicule des valeurs d’inconditionnalité, de neutralité et possède plusieurs services : gens du voyage, domiciliation, santé, Boutique Solidarité agrée par la Fondation Abbé Pierre et équipe mobile de rue, maraude mixte. A titre d’exemple, 81 000 personnes ont été accueillies lors du 1er semestre 2021.
Malgré leurs parcours de vie souvent difficiles, ces personnes présentent des valeurs, des compétences, des richesses et véhiculent des philosophies de vies positives, redéfinissant la quête du bonheur et de l’émancipation.
« Je me suis rayé le cuir un peu partout mais depuis, j’ai appris à me poser moins de questions, moins me torturer l’esprit et à ne jamais renoncer. Pour ceux qui se disent je vais m’en coller une, me foutre à l’eau, sous un train, je ne les incite pas, au contraire, tout peut s’arranger à un moment ou à un autre. Je préfère rester comme je suis. Demain, je suis sûr que dès lors où je vais ouvrir les yeux quel que soit l’endroit où je dors : « Ah, c’est beau ». Il en faut très peu, c’est vrai, je confirme. Je crois que j’ai passé le pire. »« Toutes les représentations véhiculées depuis longtemps au travers de notre histoire en France, font en sorte qu’on a du mal, sédentaires, à se représenter l’autre sans logement, comme étant capable, comme ayant des valeurs, des compétences et des richesses. On a tous des accidents de la vie, nos grains de folie, nos incapacités, nos incompétences. Et à un moment, dans notre chemin, on peut ne pas rencontrer la bonne route. Mais pour autant ces personnes, elles restent des personnes, sans logement, mais elles restent des personnes. »« J’avais une maison, des enfants et tout ce qui s’ensuit et du jour au lendemain, je me suis retrouvée SDF. J’ai eu deux cancers, je m’en suis sortie grâce à l’association qui m’a fait hospitaliser 4 mois. Je suis un traitement pour l’alcoolisme et la toxicomanie. Aujourd’hui, ce que je voudrais, c’est retrouver un travail, un appartement et voir mes enfants que je n’ai pas vu depuis 4 ans, et qu’on ne me juge pas parce que j’ai été SDF. Pour moi, c’est énorme et prouver aux autres qu’on peut toujours s’en sortir. Et c’est ce que j’ai envie vraiment. »« La maraude mixte copiloté par la Direction départementale de la cohésion sociale, soutient principalement des enfants et familles dans la rue ou dans des situations compliquées. On va dans la rue, dans les squats, rencontrer ces familles et on essaie de créer un lien pour à long terme ouvrir des droits communs et faciliter toutes démarches en respectant les choix de chacun. »« Je voyage depuis 12 ans à travers l’Europe et je travaille tout en vivant dans la rue. C’est ma manière de me développer. Je vis avec peu des choses. J’ai aussi une activité politique dans la rue, surtout en ce qui concerne l’anarchie, la liberté et la conscience éclairée. J’effectue ce travail depuis plus de 20 ans avec des amis, pour rendre matérielle la spiritualité. Nous nous entre-aidons de manière plus profonde dans la rue, pour faire évoluer le mouvement culturel de cause libertaire avec courage, intelligence, comme un acte de philosophie . »« Au départ, j’avais plein d’appréhensions, c’est quoi un SDF ? C’est quelqu’un qui fait la manche et ne veut pas travailler. Ce n’est pas le cas. Ces personnes sont certainement dans une mauvaise passe, ont besoin de soutien, d’écoute et de se sentir valorisées pour pouvoir repartir de l’avant. Vivre dans la rue, on ne sait pas ce que c’est tant qu’on ne l’a pas vécu. C’est très long une journée, sans savoir si on va manger ou non. Il faut que les personnes sortent de leur individualité et aillent vers les autres. Nous sommes tous pareils, des humains. »« J’ai perdu ma maman et ma fille en 2020. Je me suis sentie au fond de la piscine. Et puis, j’ai rencontré des personnes dans la rue, on a parlé, même si ce n’est pas facile de parler de soi. Je suis tombée dans la religion aussi et ça fait du bien, on a plus de frères et de sœurs. Et là, je suis remontée. C’est pour ça qu’il faut positiver. On croit que ça n’arrive qu’aux autres, mais les autres, c’est nous. Vu du ciel, on est tous pareils. Donc, il faut être encore plus fort. Il faut survivre et vivre. Et donner à son prochain. »« J’ai commencé ma vie professionnelle avec Médecins Sans Frontières, pendant une dizaine d’années. J’ai appris qu’il y existe un décalage entre la vision physique que l’on peut avoir des gens et la réalité. Entre ce qu’ils portent et l’instinct de vie qu’ils ont à l’intérieur d’eux, qui est beaucoup plus qu’un instinct de survie. Ce sont des gens qui ont énormément de choses à apporter. Et en apprenant à partager, sans s’attacher aux freins des conditions sociales et d’où l’on vient, on a tout à gagner et le monde devient plus positif, quand on l’aborde ainsi. »« Quand je suis arrivé ici, je n’avais pas d’endroit où déjeuner le matin. Un ami m’a conseillé la Boutique Solidarité. Et comme j’aime bien participer, j’ai fait le nettoyage et j’ai donné les masques et la solution hydroalcoolique, durant la Covid-19. Grâce à eux, je suis en contrat dans une structure qui aide les gens à retrouver un emploi, puis un logement et une vie plus stable. Je fais du nettoyage de voiries, de fossés, des zones et des parkings. J’aime ça et j’aimerais bien, un jour, continuer dans le domaine des murs végétaux et toits végétalisés. »« Tous les jours, je vois du positif. Sur les tables, dans la cour, on voit des moments de rigolade. Et c’est ça qui donne envie aussi. L’accueil inconditionnel est vraiment une richesse. On accueille tout public, des jeunes, des personnes âgées, des personnes qui viennent de l’autre bout du monde, des personnes qui ont un appartement à côté. Je trouve ça génial. C’est hyper riche. »« Je fais partie des gens du voyage, j’ai voyagé toute ma vie et je ne voudrais pas la changer. J’ai toujours fabriqué mes propres caravanes. Solidarité Pyrénées me sert pour le courrier, mais j’ai ce qu’il me faut. Je vais finir ma vie sur la route. Je veux mourir sur la route. C’est ce qui compte pour nous. Qu’est-ce que vous voulez que j’aille m’enfermer dans une maison ? Je préfère ma vie, ne rien avoir et puis avoir tout. La terre entière elle nous appartient à tous. C’est ce que les gens n’ont pas compris. Payer pour conserver. C’est ça, le problème. »« Les conversations que l’on peut avoir, les émotions qui se jouent avec ces personnes, c’est tellement enrichissant. J’apprends tous les jours de leur parcours, et ça permet de relativiser sur mes soucis. Le mec, il t’explique, que depuis gamin, il a galéré et qu’il a fait telle ou telle chose pour en arriver là et qu’il est encore debout. Qu’il a encore cette force, justement pour essayer de s’en sortir, de réussir et que toi, à ce moment-là, tu peux être une petite béquille, un petit soutien, un petit support pour l’aider, pour essayer de le lancer. C’est très gratifiant. »« En passant nos journées ensemble dans la rue, nous avons étudié le comportement des perpignanais et le projet de monter une société de vélo cargo nous est venu. C’est une chance que nous voulons offrir à toutes les personnes qui rencontrent des difficultés à se faire livrer de la marchandise et des meubles. On aimerait travailler avec l’économie locale, car on entre dans une ère écologique. Et le fait d’avoir connu la rue, ça nous ramène un peu sur terre et on sait qu’en quelques jours, tout peut basculer et c’est quelque chose qu’on n’oubliera jamais. »« On est face à des personnes qui ont vécues depuis leur naissance, beaucoup de souffrance, de dévalorisation, d’humiliation et parfois de la violence. Rien que d’imaginer ce que ça peut être de se retrouver sur le bord du trottoir et de se dire : « ce soir, je ne sais pas où je vais dormir, je n’ai plus de toit », je me dis que ça doit être extrêmement choquant et douloureux. Et ce que j’aime dans ce métier, c’est lorsqu’on arrive à donner aux personnes un bon regard humain, valorisant, de reconnaissance et montrer ce qu’elles peuvent apporter au monde. »« Aujourd’hui, je suis sorti de la rue, je vis en foyer à Perpignan et si j’avais une baguette… pour ceux qui n’ont pas d’argent, pas de maison, rien, je ferai marche arrière, en disant, « Abracadabra », voilà, tu as tout. Parce que là, dans le monde entier, il y a beaucoup de femmes et d’enfants qui vivent dans les rues. Les gens ne savent pas, mais il y a plein d’enfants qui font la manche, qui trouvent à manger par terre, qui dorment par terre, ça suffit. Stop ! Moi je rêverai de faire ça, aider les personnes en difficulté. »